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L'enfant qui devait se taire...

Bien des enfants ont été muselés...

Il lui a été interdit de parler, de s’exprimer, de rire, crier, jouer, de faire du bruit. Les grands, ses parents lui ont bien fait comprendre qu'il était braillard, turbulent, agité voire inintéressant. Les sons, les mots provenant de sa bouche ont pu être accueillis comme quelque chose d'angoissant (venant faire écho aux peurs des parents ou adultes), insipides, niais ou comme un brouhaha dérangeant. Ses cris de joie, de colère, de peur ont été blâmés voire punis. Il a pu recevoir des moqueries, des humiliations. Il a pu être soumis à une autorité injuste et fermée, recevoir des propos tels que : « je m’en fous », « tu vas te taire », « tu te répètes », « je ne comprends rien à ce que tu racontes », « je n’ai pas le temps », « arrête de pleurnicher », « je ne veux pas t'entendre », « file dans ta chambre », « tu me soûles », « j'ai autre chose à faire/foutre » ou encore des « ta gueule », « ferme-là », « je vais t'en coller une si tu continues/me réponds », « tu ne racontes pas notre petit secret où je te tue », etc. On a pu le violenter (psychiquement, physiquement) et lui faire porter le poids de la responsabilité dans un secret. Il a pu être témoin d'atrocités qu'on lui a demandé de taire, d'oublier... Dans certaines familles, il a été interdit à l'enfant d'ouvrir sa bouche à table, avec du monde voire tout le temps. Il n’a pas été invité à pouvoir exprimer ses ressentis parce que ses parents les ont ignorés, bafoués, non reconnus. Ses bavardages enfantins ont pu être méprisés, tournés en dérision voire réprimés. Ce que pense l'enfant, n'a pas intéressé mais a été surtout nié, comme si la pensée de l'enfant ne pouvait pas exister, qu'il était incapable de réflexion ni même d’avoir des désirs ou de ressentir. On lui a bien fait comprendre que seul l'adulte pensait, savait. On a passé sous silence ce qu'il avait à dire pour ne pas entendre ce qui était probablement bien dérangeant pour ces grands... On l’a empêché de parler et on a décidé pour lui. On lui a imposé de se taire, d’être sage, de ne pas faire de bruit, bien souvent en lui hurlant dessus, en le menaçant, lui faisant peur, autant de messages contradictoires que destructeurs....

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Son insouciance a été éteinte. Un enfant aime la vie et la vie est loin d’être que silencieuse… Tout cela parce que les parents n’ont pas su gérer leur stress, leurs blessures, leurs déséquilibres. Ils ont obligé les enfants à se taire pour ne pas regarder le vacarme qui vit en eux…

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Cette obligation au silence est violence car elle nuit au développement de l'enfant. La capacité d’exprimer ses pensées, ses idées, ses ressentis, ses émotions permet d’être accueilli dans son soi véritable. Être encouragé, accueilli dans son expression permet à l'enfant de grandir en accord avec lui-même. L'accompagner à poser son Verbe, permet à l'enfant de trouver la justesse. Mais au lieu de l'élever, il a été opprimé. Alors il se tut (tue...) et son innocence avec. Il a retenu son expression pour être aimé ou au moins pas/moins rejeté…

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Un enfant qui a du se taire grandit en manquant de confiance en lui. Lorsqu'il devient grand, il peut être tellement formaté à ne pas parler qu'il ne sait même pas s'exprimer. Il est alors dans une sorte de mutisme parce qu’il est incapable d’exprimer ses ressentis, ses émotions dont il est coupé depuis l’enfance. Il peut aussi ne même pas lui venir l’idée de parler. Il peut avoir peur qu’on se moque de lui, qu’on lui coupe la parole, d’être jugé (et ainsi rejouer ce qu’il a vécu enfant). Ou alors, il se met à jacasser sans cesse, à parler pour ne rien dire, être un moulin à parole. Il parle alors constamment et devient autant fatiguant pour lui que pour les autres. Il ne sait pas trier ses pensées pour verbaliser ce qui lui est juste. Il ne sait pas modérer sa parole parce que parler est pour lui une compensation à ce qu’il a vécu. Il parle à outrance parce qu’il n’a pas été entendu petit et recherche auprès de son auditoire, une oreille bienveillante qu’il n’a pas eu de ses parents. Il peut aussi se montrer trop franc ou menteur invétéré parce que la vérité et l’exprimer est quelque chose en déséquilibre chez lui.

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L’Être manque d'assurance et de sécurité. Il est sur la défensive, les autres lui font peur. Il n’a pas confiance en sa voix/voie. Celle-ci peut d'ailleurs se montrer tremblotante, inaudible, perçante, imposante, autoritaire, disharmonieuse, etc. L'Être peut aussi se mettre à hurler, dans des crises de rages qui font pâlir les autres, un moyen de dominer et de pouvoir exprimer ce qui l’embête. Il peut vomir des mots ou être dans un mutisme, bégayer, perdre la voix, être sans voix, etc. Il ne maîtrise pas sa voix qui traduit ces déséquilibres car elle n’a ni entendue ni soutenue.

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L’Être a donc a verbaliser, travailler sa voix, prendre plaisir à s’exprimer. Il peut chanter la vie. Pour se faire, il peut travailler sa voix par le chant, des groupes d’expressions, de la musicothérapie ou dans la simplicité de laisser sortir des sons. Il peut réapprendre à crier (le cri n’est pas mal…) à murmurer. Il peut jouer avec les tonalités, apprendre à faire vibrer les sons dans sa bouche, son corps. Il va ainsi peu à peu se réapproprier son organe, être à l’aise avec les sons qui émanent de lui. Il va aussi apprendre à entendre sa voix, se pacifier et s'amuser avec elle. Plus l'Être prend conscience de sa voix, plus il va s'axer dans le timbre, le débit, l'intonation et l'intensité qui lui est juste et lui ressemble.

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Et puis il a à faire un travail sur ses blessures, apaiser l’enfant intérieur, le rassurer, le combler. L’Être a donc à comprendre ce que le fait de se taire vient faire vibrer en lui entre frustrations, peurs et crainte du jugement. L’Être a aussi à comprendre ce que le bruit vient faire écho chez lui.

L’enfant a le droit de crier sa joie, son désarroi. Son cri est raffut pour celui qui ne sait pas entendre l’enfance. L'Être peut toutefois faire comprendre à son enfant intérieur que les sons provenant de son corps ont plusieurs niveaux d'intensité, pour se faire, il peut jouer avec lui et le lui montrer. L'enfant va ainsi se découvrir par sa voix mais aussi dans son incapacité à la maîtriser sans pour autant se faire punir ou châtier s'il dépasse des limites. Il est possible de cadrer un enfant tout en étant sécurisant et bienveillant... L’Être incite son enfant à s’exprimer, se confier, donner sa vérité, ses ressentis. Il l'encourage à dire ce qu’il pense même si c’est en désaccord avec ce que penses les autres et les adultes. Il a d’ailleurs à le féliciter d’avoir sa pensée à lui. L’Être peut même être curieux de ce que cet enfant a à partager, il pourrait bien lui apprendre des choses ! L’Être aime son enfant intérieur dans ce qu'il est et le pousse à sortir de sa timidité et ses angoisses. Il lui donne confiance en lui, en son expression, ne le censure pas. L’Être a aussi à se déprogrammer de ses peurs et à s’insuffler le droit d’exister, de parler de donner son verbe. Alors l’adulte peut apprendre à son enfant intérieur à adoucir sa voix parce qu’il a aussi le droit de crier, pester, pleurer violemment et avec fracas. Il lui montre la paix du monde du silence parce qu’il va l’autoriser à jouer avec les sons. Alors l’enfant va trouver son équilibre entre bruit et silence. Il va alors apprendre la justesse de la parole, la mesure. Il va s’axer en s’écoutant lui-même pour que sa parole ne soit pas un déversoir. Il va octroyer la possibilité d’exprimer ses pensées sans peur ni honte parce qu’il a confiance en lui et qu’il se fiche des avis extérieurs. Il est à l’aise avec lui-même, dans le bonheur et la Joie d’être. Son verbe est l’émanation de ce qu’il est, sa voix est son organe chantant, une passerelle qui communique et le lie avec les autres comme l’univers.


Céline (28/07/2017)

https://www.desvaguesalame.com/



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